Je ne sais pas où je suis. Ce n'est pas que je sois perdue. C'est que je ne sais pas où l'on me stocke. Je ne sais pas où l'on me voit. Je suis virtuelle, je suis perdue. Physiquement. Ça veut bien dire quelque chose. Mais pas là. Où ?
Là.
Quoi ? Rien. Là, des choses. Où sont-elles ? Dans mon disque dur pour l'instant. Mais ça dure pas. Ailleurs pôf. D'un coup. Sec, un coup de trique mécanique. Miniaturisation des petites pensées et des grands appétits commerciaux. Ici et là. Volatilisés. Je passe à l'Euro. Belle jambe. Mais mes textes ? Ma fatigue ? Vous êtes où ? Y a t'il une plante verte dans la pièce du lecteur ? Et celui qui lit stocke-t'il finalement ma prose ? Et de quel droit ? Et qu'écoute-t-il comme moi le Crazy Horse au temps de sa gloire ? Volatilisé. MP3. Des sigles dans tous les sens, à dévaler les pistes. Du disque dur. De l'anglais, du "E" prononcé "ee". Et surtout du silence. Jamais entendu autant de silence qu'en fin d'année électronique. Ça lit dans son coin, ça la ferme dans son coin. Ça stocke, ça subtilise, c'est volatile. Ça n'est pas bouillonnant. De l'information, j'en ai jamais vu autant. C'est la crue perpétuelle ! On est fatigué dans les services, dans les 35 heures, vivement les vacances. On a de la chance ! Où est-on ? Dans la crue perpétuelle.